À la fin du mois d’avril 2022, l’équipe du programme Terraso de Tech Matters s’est rendue aux Galápagos pour rejoindre nos six organisations internationales partenaires de l’initiative Mille paysages pour 1 milliard de personnes (1000L) pour un atelier de co-conception de cinq jours. L’objectif de cet atelier était double. D’une part, inspirer et accélérer le travail de conception à travers un dialogue dynamique et stimulant, et d’autre part, approfondir nos relations de travail à travers des interactions en face à face. Au cours des deux dernières années et demie, les douzaines de participants ont travaillé ensemble pour mettre en place cette initiative sans bénéficier de réunions en personne.
Pour comprendre le contexte, le but de 1000L est de canaliser des outils, des informations et des fonds financiers vers des responsables locaux à travers le monde, tout en essayant de construire des économies locales plus durables et régénératives dans le contexte du changement climatique. Souvent, cela revient à quelque chose d’aussi simple que de se demander si l’augmentation du salaire des agriculteurs peut se faire tout en consommant moins d’eau.
Nous avons consacré la plupart de notre temps à des sessions de co-conception, en profitant du fait que nous étions tous ensemble en personne, au lieu d’être sur Zoom, répartis sur cinq fuseaux horaires différents. Cela nous a permis de vraiment approfondir le travail de conception autour de tous les éléments clés de 1000L : les modules d’apprentissages paysagers, les outils d’évaluation financière et la plateforme numérique Terraso, ainsi que d‘explorer des stratégies de communication et de mise à l’échelle.

Toutefois, il était très important pour nos partenaires (et pour nous !) d’entendre les voix des responsables locaux du paysage. C’est pourquoi nous nous sommes rendus dans un endroit qui poursuit activement des stratégies durables paysagères plutôt que de rester dans un hôtel dans une grande ville. La partie la plus passionnante de l’atelier de co-conception fut la journée dédiée à la rencontre des responsables locaux des Galápagos et à l’écoute de leurs défis. Nous avons commencé par visiter quatre fermes différentes. Elles étaient toutes assez frappantes dans leurs diverses approches de l’agriculture durables et respectueuses de l’environnement. Le terrain de chaque ferme est très unique, ce qui a un impact considérable sur ce qui est cultivé et la manière dont cela est cultivé. Une des fermes avait un sol plus rocailleux, donc elle concentre ses efforts sur la culture maraîchère, les arbres fruitiers et les plantes endémiques des îles Galápagos. Une autre ferme est traversée par des tubes de lave, donc plutôt que de cultiver, elle se concentre sur l’élevage durable et la protection des espèces ayant un intérêt écologique pour les Galápagos. La troisième ferme se concentre sur la production hydroponique de laitues et de café à travers un système agroforestier. La dernière ferme est tenue par Scott Henderson, un responsable de longue date du programme de Conservation Internationale aux Galápagos et un membre de l’initiative 1000L ; cette ferme produit du café biologique d’une manière durable et respectueuse des travailleurs.

En effet, être capable de voir ces sites de première main a été inestimable. Pour la plupart d’entre nous, ce fut la première expérience dans un environnement où il n’y avait véritablement pas d’accès à l’internet ou au Wifi. Alors que nous estimons que ceci est le cas pour la majorité de nos utilisateurs et que nous planifions dans ce sens, il n’y a rien de tel que de les voir en faire l’expérience. Cela a mis en évidence la nécessité de disposer d’outils qui fonctionnent à la fois en ligne et hors ligne et a souligné notre appréciation pour l’impact de KoBoToolbox, le premier outil de collecte de données que nous avons ajouté à l’inventaire des outils paysagers numériques de Terraso et qui fait exactement cela.
Nous avons été fascinés par l’approche agricole de l’agriculteur Romer Ochoa. Dans sa ferme, les laitues sont cultivées avec la méthode hydroponique. Il est capable de produire de la laitue plus rapidement, à plus haut rendement et en utilisant moins d’eau que pour les laitues cultivées sur le continent équatorien. Toutefois, malgré cet exploit, il peine à maintenir un marché fiable pour son produit. Un problème qu’il croit être lié à une turbulente économie après-Covid, aux niveaux changeants du tourisme et au secteur public qui lutte toujours pour promouvoir l’autosuffisance des Galápagos par rapport au continent. L’expérience de Romer nous rappelle que les solutions durables dépendent de la confluence des politiques, des affaires, des finances et de la communauté. Alors que nous construisons Terraso, nous devons nous rappeler que les approches systémiques sont nécessaires pour acquérir un succès double, d’une part pour le produit Terraso et d’autre part pour les acteurs paysagers pour lesquels nous le construisons, tout en gardant à l’esprit les vraies personnes sur le terrain, comme Ochoa.

Après les visites sur le terrain nous avons écouté les paroles d’une douzaine de responsables issus de différents secteurs de l’agriculture, du tourisme et de la communauté des Galápagos. Leurs histoires étaient vivantes et réelles. Une des histoires les plus marquantes était celle du responsable du club de surf local, qui a efficacement collecté et utilisé les données pour défendre un meilleur accès aux opportunités de loisirs récréatives (tel que les spots de surf) pour les résidents de la communauté. L’équipe de Terraso est toujours ravie d’entendre des histoires sur la façon dont les données peuvent conduire à des changements positifs !
En tant que spécialistes des données et de l’évaluation, une de ces histoires nous a intéressés car cela tourne autour de la question du ressentiment des responsables locaux des ONG au sujet d’évaluations. Un des responsables a remarqué qu’une « évaluation » peut créer un sentiment de jugement. Les gens qui traversent ce processus peuvent se sentir inadaptés si l’expérience est conçue sans tenir compte des leurs connaissances. Cela nous a rappelé que nous devons prendre du recul et bien réfléchir à la manière dont Terraso doit être conçue, pour que le processus de renforcement des capacités devienne une expérience positive qui célèbre l’échange de connaissances, plutôt que de laisser les personnes dans le doute sur leurs capacités.
C’était un atelier extrêmement puissant et réussi. Avoir l’opportunité de visiter les sites nous a vraiment montré les défis auxquels les parties prenantes de Terraso sont confrontées et l’importance du processus de co-conception. Être là personnellement nous a réellement permis de prendre de l‘avance sur nos efforts de conception et nos relations ont fleuri, préparant le terrain pour beaucoup d’autres réunions Zoom!